Richard III est le récit d’une soif de pouvoir. En effet, tout y est : un homme enjôleur, calculateur et fourbe, une ascension irrésistible, une chute fulgurante. Mais on peut aussi y voir le récit d’une soif de vengeance. On aurait même presque envie de dire qu’il s’agit d’une soif de vengeance légitime. Semblable au bâtard méprisé du Roi Lear, au Duc déchu de La Tempête ou à l’usurier ridiculisé du Marchand de Venise, ce bossu de Gloucester s’est tordu sous le regard des autres. Et en voyant le reflet de son ombre, c’est bien cela qu’il rumine : « J’ai décidé de jouer le rôle du grand méchant et de haïr les plaisirs frivoles de notre temps ». Bref, vous m’avez fait hideux, et bien, je le serai jusqu’au bout!
C’est sous un soleil d’York que Richard revient de la guerre civile qui a ravagé le royaume. Mais cette nouvelle paix gagnée durement l’ennuie déjà. Il a besoin de désordre, de fureur et d’effroi. Accéder au trône deviendra alors le prétexte pour répandre le chaos. Et rien ne pourra résister à sa marche triomphale. Plusieurs tomberont, mais seuls les enfants de son frère seront les victimes innocentes de son ambition. Les autres ? Ils ont toujours été les complices du mal qu’il incarne par ailleurs. Richard démasquera leur lâcheté, leur arrogance et leur cupidité. Il les fera payer pour leurs fautes passées avec une dégaine et une dérision désarmantes.
C’est bien là que l’on touche au génie de Shakespeare. Qui d’autre marie avec un tel brio le comique et le tragique ? Qui d’autre arrive à donner corps à la figure absolue du mal radical tout en lui attribuant un visage résolument humain ? Rien d’étonnant donc, à ce que Brigitte Haentjens ait choisi de s’attaquer à ce classique. Cette rencontre semble aller de soi tant on y retrouve les thèmes qui lui sont chers : l’ordre et la révolte, l’Histoire en marche, le carcan social et la réalisation individuelle, etc.
Dans une nouvelle traduction de Jean Marc Dalpé et avec une imposante distribution entourant Sébastien Ricard, cette création devrait rappeler à tous et toutes la puissance de cette œuvre. Car enfin, comment ne pas s’esclaffer devant l’ironie dont Richard teinte tous ses mots et gestes ? Comment ne pas envier la totale liberté de cet homme qui se moque des conventions et des superstitions ? Comment ne pas s’émouvoir devant la chute de cet homme désespérément seul ?
De William Shakespeare Traduit par Jean Marc Dalpé Mis en scène par Brigitte Haentjens Avec : Sébastien Ricard (et par ordre alphabétique) Sylvio Arriola, Marc Béland, Larissa Corriveau, Sophie Desmarais, Sylvie Drapeau, Francis Ducharme, Maxim Gaudette, Reda Guerinik, Ariel Ifergan, Renaud Lacelle-Bourdon, Louise Laprade, Jean Marchand, Monique Miller, Olivier Morin, Gaétan Nadeau, Etienne Pilon, Hubert Proulx, Paul Savoie et Emmanuel Schwartz Assistance mise en scène et régie : Colette Drouin Dramaturgie : Mélanie Dumont Scénographie : Anick La Bissonnière Costumes : Yso Musique : Bernard Falaise Lumière : Etienne Boucher Maquillage et coiffures : Angelo Barsetti Accessoires : Julie Measroch Vidéo : Éric Gagnon Collaboration au mouvement : Christine Charles Direction technique : Jean-François Landry Direction de production : Sébastien Béland Direction administrative : Xavier Inchauspé
Avec la participation de : Maniement des armes : Huy Phong Doan Sonorisation : Frédéric Auger Assisté de : Maxime Lambert Adjointe à la production : Chloé Ekker Collaboratrices à la production : Dominique Cuerrier, Julie Sauriol, Laurence Boutin-Laperrière, Maude St-Pierre Léonard Photo de production : Yves Renaud Photo en studio : Angelo Barsetti & Richard Morin Photos de répétitions : Jean-François Hétu
Une création de Productions Sibyllines
avec la collaboration du Théâtre du Nouveau Monde
et du Théâtre français du CNA
Présenté du 10 mars au 4 avril 2015 au Théâtre du Nouveau Monde, Montréal.
Présenté du 21 au 25 avril 2015 au Théâtre français du Centre national des Arts, Ottawa.
Prix du « meilleur spectacle Montréal » de la saison 2014-2015, par l’Association des critiques de théâtre du Québec.
Prix du « meilleur interprète masculin » pour Sébastien Ricard, de la saison 2014-2015, par l’Association des critiques de théâtre du Québec.
Prix Gascon-Roux du « meilleur interprète masculin » pour Sébastien Ricard, de la saison 2014-2015 du TNM.
Prix Gascon-Roux des « meilleurs costumes » pour Yso, de la saison 2014-2015 du TNM.
Prix Grafika dans la catégorie « publication culturelle » pour le cahier dramaturgique de Richard III
« Le texte et la mise en scène forment une démarche réfléchie, homogène et on ne peut plus claire. Un an de travail et une direction assurée, assumée ont de ctte production un grand moment de théâtre. »
Mario Cloutier, La Presse
« Sébastien Ricard endosse avec une rare conviction la démesure de son personnage. Quand un comédien exprime la perfidie avec autant de justesse, qu’il s’abandonne aussi pleinement à la vilenie dont l’homme est capable, c’est toute une communauté qui s’en trouve purgée. »
Christian Saint-Pierre, Le Devoir
« Brigitte Haentjens signe ici une mise en scène limpide. […] Visuellement, ce spectacle est éblouissant : les éclairages superbes magnifient le décor, les costumes colorés et sensuels des femmes soulignent leur différence. »
Louise Vigeant, JEU
« Magnifique, colossal, le Richard III de Haentjens confirme avec intelligence que les classiques peuvent être à la fois transcendés et transgressés, surtout quand c’est avec habileté. »
Élie Castiel, Séquences